Une trentaine de scientifiques en action !
Après Embrun en 2018, c’est Crots qui a débuté ce printemps l’inventaire de sa biodiversité communale. Pour donner un sérieux coup de pouce à cet exercice, le Parc national a convié une trentaine de scientifiques, pour beaucoup de renommée nationale, à prospecter le vaste territoire de Crots. Des berges du lac de Serre-Ponçon aux cimes du cirque du Morgon, les participants ont pu compter sur une météo parfaite pour multiplier les recherches et les prélèvements.
Quelques spécimens observés
Pendant 3 jours, le gîte de la Draye a servi de camp de base pour les nuitées et les repas du soir qui sont également des moments de convivialité privilégiés durant lesquels une partie des espèces ont été triées. C’est également en soirée que se sont organisées les différentes expéditions du lendemain avec le concours d’une quinzaine d’agents du parc qui ont facilité la mise en œuvre de celles-ci grâce à leur connaissance du territoire.
Mieux connaître le méconnu
L’ambition portée par cet évènement est considérable : identifier le plus grand nombre d’espèces possible au sein de groupes écologiques peu ou pas étudiés. Depuis bientôt 50 ans, le Parc national des Écrins recense le patrimoine biologique au sein du territoire des communes qui le composent. Cette connaissance est particulièrement bien développée au sein des groupes faunistiques « traditionnels » comme les oiseaux, les mammifères, les reptiles ou les amphibiens, pour lesquels les différentes espèces sont maintenant bien connues. Cette composante de la biodiversité est un peu l’arbre qui masque la forêt puisque la grande majorité des espèces du règne animal vivant sur terre est composée d’invertébrés (les animaux qui n'ont pas de vertèbres, de squelette). On estime ainsi que leur nombre représente plus de 90 % des espèces !
À titre d’exemple, 267 espèces d’oiseaux ont été observées dans le parc national, tandis que près de 1 473 espèces de papillons sont actuellement connues sur ce même territoire. Autre exemple pour illustrer la répartition de la diversité des espèces dans les différents groupes biologiques, le Parc national des écrins a recensé 175 espèces de mollusque ces dernières années tandis que 88 espèces sont connues pour les mammifères. Il ne s’agit pas ici de mettre en compétition les groupes biologiques les uns par rapport aux autres en se basant sur une approche purement comptable, mais plutôt d’assumer sereinement un manque de connaissance et de mettre en œuvre des dispositifs d’inventaires qui permettront de combler peu à peu ces lacunes.
Comme l’explique Damien Combrisson, chargé de mission invertébrés au Parc national, « il n’y a pas d’échelle de valeur à proprement parler lorsque l’on compare l’observation d’un bouquetin à celle d’une araignée. C’est davantage une construction anthropomorphique qui tend à nous faire croire qu’une espèce est plus utile qu’une autre. Nos écosystèmes (forêt, prairie...) se caractérisent par l’ensemble des espèces qu’ils abritent ainsi que par les relations écologiques qui se développent. Une chose est certaine, plus la richesse spécifique, c’est-à-dire le nombre d’espèces, est importante, plus les relations écologiques sont diversifiées et plus l’écosystème est résilient et capable de surmonter les changements importants. »
Plus de 500 espèces observées
Pour mieux visualiser les passages des scientifiques, des cartes de la commune montrant les lieux où ils se sont rendus ont été produites. Malgré certains groupes d’insectes et de champignons moins présents qu’espérés, les conditions étaient favorables pour la plupart des spécialistes, avec des centaines d’observations à la clé. En se basant uniquement sur les retours des agents dans la base de données du Parc national, ce sont 538 espèces de faune et de flore qui ont été observées, dont certaines pour la première fois dans les Écrins ! Une espèce de syrphe et une espèce de charançon jusqu’alors inconnues dans le territoire ont ainsi pu être identifiées. L’expertise de Cédric Dentant, botaniste du Parc, a également permis de relever la présence d’une nouvelle espèce de plante pour les Écrins.
De nouvelles surprises tomberont certainement après l’étude des spécialistes sur les spécimens capturés. En effet, l’emploi d’une loupe binoculaire est souvent indispensable pour reconnaître une espèce et les scientifiques n’ont pas encore livré les résultats de leur inventaire. Verdict à l’automne !
Lieux de prospection des scientifiques vendredi 10 et samedi 11 juin
Ce n’est pas tant l’aspect quantitatif (nombre de données) que l’aspect qualitatif (nombre d’espèces différentes observées dans chaque groupe) qui permettra d’évaluer la contribution scientifique de cet événement à la connaissance du patrimoine communal. Traditionnellement, plusieurs niveaux d’interprétation sont utilisés : le nombre total d’espèces observées, les nouvelles espèces pour la commune, celles qui sont nouvelles pour le parc et celles qui sont nouvelles pour la France (le saint Graal des taxinomistes est la découverte d’une nouvelle espèce pour la science, un événement rare pour tout chercheur…).
3 jours qui ont vocation à durer
L’évènement a débuté officiellement le vendredi 10 juin au soir au gîte de la Draye sur les hauteurs de Crots. Damien Combrisson, chargé de mission invertébrés au Parc national et organisateur des 3 jours, a pris la parole pour accueillir et remercier les participants à la prospection. Jean-Pierre Gandois, maire de Crots, et Pierre Commenville, directeur du Parc national, sont également intervenus, notamment pour souligner la très forte concentration d’experts entomologistes français présents. Une vraie réussite donc pour ces 3 journées, dont le thème sera prochainement élargi aux habitants de Crots afin de les sensibiliser à l’inventaire en cours sur leur commune.
Plusieurs animations seront ainsi proposées au grand public sur le thème de la biodiversité. Une présentation orale et un livret d’une quarantaine de pages permettront de synthétiser l’ensemble des connaissances acquises sur la commune.
Le groupe des prospecteurs. Un grand merci à eux !