Deux bouquetins retrouvés morts, dans le Valbonnais et le Champsaur

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Le bouquetin mort a été retrouvé dans un vallon quasi-inacessible  - © R.Papet/PNE
Lundi, le signal de mortalité d'un bouquetin équipé d'un collier GPS venait d'un vallon quasi-inaccessible du Valbonnais. Deux agents du Parc sont parvenus à rejoindre l'animal pour récupérer le collier et réaliser des prélèvements. Jeudi, c'est dans le Champsaur que les agents ont autopsié un autre animal.

Le premier objectif du programme de suivi des bouquetins par collier GPS est de pouvoir récupérer rapidement des cadavres afin de déterminer la cause de la mort.

Cette occasion s'est présentée à deux reprises cette semaine. Lundi 23 février lorsque les agents du Parc national, en charge du suivi des animaux marqués, ont été prévenus par SMS que le collier de Rissole, mâle de 7ème année, émettait un signal de mortalité.

Recherche bouquetin mort Valbonnais -  © L-Imberdis/PNE Recherche bouquetin mort Valbonnais -  © R.Papet/PNE

Le bouquetin mort a été retrouvé dans un vallon quasi-inacessible - © R-Papet/PNE Dès mardi matin, malgré une météo incertaine, Rodolphe Papet, agent sur le secteur du Champsaur et Ludovic Imberdis, technicien dans le Valgaudemar, se rendaient sur place. Il leur a fallu faire usage de la corde, du piolet et des crampons pour retrouver l'animal sur une zone d'hivernage escarpée.

Heureusement, le GPS donnait une localisation très précise de l'animal.

Les agents ont procédé aux prélèvements habituels et ont récupéré le collier qui pourra équiper un autre animal à l'avenir.

Autopsie sur site

Il est généralement impossible de ramener un bouquetin mort jusqu'au laboratoire vétérinaire qui pourrait analyser les causes de son décès. Grâce à la formation assurée par l'ATEN (atelier technique des espaces naturels) et le Laboratoire vétérinaire des Hautes-Alpes, une partie des agents du Parc national est capable de réaliser une autopsie de l'animal. Il s'agit d'estimer l'état général de l'animal (maigreur, signes de diarrhée ou de jetage nasal) et de tenter de repérer des lésions externes (blessures, lesions occulaires ou cutanées) et/ou  internes (congestion, inflammation, infection, abcès, lésions parasitaires....). Ensuite, tous les organes portant des signes anormaux et les organes filtrants (poumon, foie rein) sont prélevés pour analyse.

Le bouquetin mort a été retrouvé dans un vallon quasi-inacessible - © L-Imberdis/PNE

Lors de sa capture, les analyses de sang avaient révélé que cet animal avait été en contact avec le virus du CAEV. Cette maladie des caprins  provoque des arthrites, des encéphalites et des problèmes respiratoires qui entrainent généralement la mort. Il n'y a pas de vaccin et cette pathologie est assez répandue sur les troupeaux domestiques. Elle se transmet par la reproduction et l'allaitement. Dans le Valbonnais, on connait des cas d'hybridation entre bouquetin et chèvre domestique, qui pourraient expliquer le passage du virus sur la faune sauvage.

Le bouquetin mort a été retrouvé dans un vallon quasi-inacessible - © R.Papet/PNE Les résultats d'analyse des prélèvements effectués seront donc particulièrement intéressants : le CAEV est-il responsable de la mort de ce bouquetin ? Si c'est le cas, comment se manifeste cette maladie chez cette espèce ? Sinon, la mort est-elle accidentelle ou liée à une autre pathologie ?

En tous cas, la question de la cohabitation de chèvres férales (retournées à l'état "sauvage") et des bouquetins reste posée : pour des raisons génétiques et sanitaires, cela constitue une menace pour la survie des populations de bouquetins.

 

Le bouquetin mort a été retrouvé dans un vallon quasi-inacessible - © R.Papet/PNE La dernière position de Rissole et le signal de mortalité venu d'un vallon perché. Sur le site Bouquetins du Parc national des Ecrins, on peut également visualiser les parcours de l'animal depuis qu'il avait été équipé d'un collier dans le cadre du programme de suivi.

Un deuxième bouquetin mort, dans le Champsaur

C'est à 13h, ce mercredi, qu'un nouveau message est arrivé, du Champsaur cette fois. King, un autre mâle de 7 ans est mort dans le vallon du Tourond. Il a été retrouvé jeudi matin et, à midi, les prélèvements réalisés sur l'animal étaient déposés au laboratoire vétérinaire de Gap.
La zone ou était situé l'animal était moins escarpée que dans le Valbonnais mais l'équipement crampons-piolet était néanmoins nécessaire. Sur site, Michel Bouche et Olivier Lefrançois, ont réalisé divers prélèvements et l'autopsie de l'animal qui ne pouvait pas être ramené entier jusqu'au laboratoire à Gap.

Un bouquetin mort dans le Champsaur - février 2015- photo O.Lefrançois/Parc national des Ecrins

Le bouquetin retrouvé mort dans le Champsaur a fait une chute mortelle qui lui a défoncé le crâne. " Mais cette chute n'est pas anodine", commente Michel Bouche. "L'animal est très maigre et à l'ouverture des cavités nous avons trouvé de nombreux abcès et des adhérences. Ce sont les signes de la maladie des abcès ou lymphadénite caséeuse, véritable cause de la mort. Elle a affaibli l'animal jusqu'à provoquer son dérochement."
Cette maladie, bien connue dans les élevages ovins n'est pas très contagieuse mais la bactérie responsable, résistante plusieurs semaines en milieu extérieur, se transmet par l'alimentation, la respiration ou des blessures à partir de pus venant d'abcès cutanés de bêtes malades.
"C'est le huitième bouquetin mâle que nous retrouvons victime de cette maladie et le troisième parmi les animaux porteurs de collier."
La mortalité des adultes est chez les ongulés le facteur le plus impactant sur la croissance des populations.

L'Europe (FEDER), le ministère de l'Ecologie et les régions Rhône-Alpes et PACA soutiennent cette action du Parc national des Écrins.