Michel Bouche : le départ en retraite d’un pilier des Parcs nationaux alpins

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Fin juin 2023, le Parc national des Écrins a souhaité un bon vent à Michel Bouche, technicien du patrimoine dans l’Embrunais, qui a pris une retraite bien méritée après 29 ans au service des Parcs nationaux alpins, dont 21 dans les Écrins. Tantôt monsieur bouquetin, pour son suivi de l’espèce en Vanoise puis dans les Écrins, tantôt monsieur lièvre variable, son animal fétiche, il a œuvré tout au long de sa très belle carrière à l’amélioration des connaissances sur la faune sauvage.

Michel Bouche en 2013 © M. Coulon - PNE

Des débuts dans les Écrins avant un tour en Vanoise

Michel Bouche en 2010 © C. Coursier - PNE L’histoire entre Michel Bouche et les Parcs nationaux débute très tôt, lors qu’il entame en 1984 un service civil de deux ans aux Écrins en tant qu’objecteur de conscience. Vétérinaire de formation, il met ses compétences à disposition du service scientifique où il travaille sur la kérato-conjonctivite du chamois puis sur la réintroduction des bouquetins dans le Champsaur. Il renoue ensuite avec son métier de vétérinaire pendant dix ans dans l’Embrunais avant d’accomplir son rêve : réussir le concours de garde-moniteur. Il intègre ainsi le Parc national de la Vanoise le 1er avril 1996, où il œuvre pendant huit ans en haute Tarentaise. « Je garde de supers souvenirs de ces années, raconte Michel. Je m’occupais des réserves naturelles (Sassière, Sache, Iseran puis Bailletaz). J’ai adoré avoir toutes les cartes de la gestion en main sur un tout petit espace  : travaux, recrutement, suivis scientifiques, recherche de budgets... »

Une mission pédagogie suivie d'un retour sur le terrain

Michel Bouche relachant un hibou grand duc en 2013 © M. Coulon - PNE À la faveur d’une mutation, il réalise son souhait de revenir dans les Hautes-Alpes en intégrant le service communication du Parc national des Écrins en tant que chargé de mission pédagogie, puis le secteur de l’Embrunais en tant que technicien du patrimoine. Il nous retrace son retour : « Je suis arrivé aux Écrins le 1er octobre 2004 après avoir travaillé en Vanoise, et le 1er novembre 2007 en Embrunais.C’est passé à une vitesse incroyable ! Ma mission pédagogie et éducation à l’environnement n’a duré que trois ans mais j’ai eu l’impression de faire beaucoup de choses intéressantes. Parmi les choses marquantes pour moi, il y a eu la création des expositions La montagne, c’est quoi ? et Territoires. J’ai aussi coordonné l’édition du livre sur la faune avec Glénat. Ça a été un travail collaboratif et d’équipe que j’ai beaucoup aimé et qui m’a laissé de très bons souvenirs. À mon arrivée à Châteauroux, j’ai découvert une équipe très motivée et très soudée. Dans le cadre de mon travail, j’ai participé aux programmes de suivi du bouquetin et du lièvre variable, c’était top ! C’était ce que j’avais toujours rêvé de faire : travailler sur une espèce et découvrir des choses avec les dispositifs qu’on mettait en place. Grâce aux colliers GPS sur les bouquetins, on a appris énormément de choses sur l’espèce, idem avec la génétique pour le lièvre variable. Ces technologies nouvelles nous ont permis de faire des pas immenses dans la connaissance, et c’est hyper satisfaisant et valorisant d’avoir participé à ça. »

Collecte de crottes pour le protocole lièvre variable © M. Coulon - PNE Pour Dominique Gauthier, directeur du laboratoire départemental vétérinaire des Hautes-Alpes et ami de Michel depuis l’école vétérinaire, « à son arrivée dans l’Embrunais, il a pu s’exprimer en renouant avec ses études sur le lièvre variable. C’est son espèce totem, il a fait un DEA dessus dans le cadre de nos études puis il a écrit un livre en 1989. Les activités scientifiques le motivaient beaucoup. Lorsque les programmes sur le bouquetin se sont amplifiés, il était le référent sur cette espèce, surtout pour les captures, de part sa formation vétérinaire. Il s’est impliqué à son image, de façon très compétente, dans la modestie et avec le sens du service. »

Un passionné discret mais tenace

Michel Bouche en 2017 © P. Saulay - PNE C’est cet ensemble de qualités professionnelles et humaines qui ont fait de Michel un collègue très apprécié. Olivier Lefrançois, garde-moniteur dans l’Embrunais, résume cet homme en quelques phrases : « C'est un sacré collègue que nous devons laisser partir... Michel est de ces collègues toujours disponibles, toujours motivés, toujours partout. Là haut, tout là haut, mais aussi en bas, au bureau, à la lumière des néons avant le lever du jour ou le soir tard. Un passionné de tout, un grand naturaliste, mais aussi un syndicaliste convaincu. Il reste un très grand sportif qui a gardé sa grande forme malgré parfois des blessures dont il ne se plaint jamais. Grâce à ces compétences et à sa ténacité, il a contribué au Parc de la Vanoise comme au Parc des Écrins à l’implication de ces établissements dans des politiques de protection de la nature, chose à laquelle il a toujours été très attaché. Michel aura aussi été un excellent formateur, un modèle pour les nouvelles générations de gardes. » Dominique Gauthier complète : « Michel est quelqu’un de dévoué, avec un vrai sens du service de la protection de la nature, et pugnace. Quand il a une idée, il la mène jusqu’au bout... même si ce n’est pas toujours apprécié par les gens qu’il côtoie ! Il a de l’humour, c’est un bon vivant, fidèle dans ses actions et aussi dans ses amitiés et sa famille. »

Capture et marquage bouquetin dans le massif des Cerces en 2016 © C. Coursier - PNE Capture d'un bouquetin entravé par un câble à la patte arrière droite en 2019 © C. Coursier - PNE

Une carrière longue et riche

Pour le mot de la fin, laissons à Michel le soin de dresser le bilan de cette (longue) carrière entre Vanoise et Écrins : « Ça a toujours été un rêve de travailler en montagne sur la faune sauvage, et j’ai eu l’immense chance d’avoir pu le réaliser ! J’ai bien conscience que ce n’est pas donné à tout le monde de faire quelque chose qui concilie activité professionnelle et convictions personnelles. Toutes ces années ont été très très riches, elles m’ont permis de rencontrer beaucoup de gens et d’apprendre beaucoup de choses. Je repars l’esprit plein ! »

Capture bouquetin, campagne Champsaur 2023 © R. Papet - PNE Capture bouquetin, campagne Champsaur 2023 © R. Papet - PNE

Michel à l'occasion de sa dernière campagne de captures de bouquetins en avril 2023