Un site aménagé sommairement à l’époque
« L’aménagement du pré de Mme. Carle a été l’un des gros dossiers que j’ai eu à traiter en arrivant au Parc. À l’époque, il n’y avait pas de parking organisé sur le site, les voitures stationnaient n’importe comment sur la gravière. Il n’y avait que quelques cheminements routiers tracés et nettoyés au printemps pour enlever les pierres des éboulements et des débordements du torrent. Et puis un hiver, de grosses pierres sont tombées sur des emplacements de stationnement. Il a fallu prendre le taureau par les cornes !
Une nouvelle philosophie pour l’aménagement en site naturel
La première réaction des élus et professionnels locaux a été de vouloir aménager un parking en macadam, comme en zone urbaine. Nous ne pouvions pas accepter cette option, parce que nous défendions le principe d’aménager les milieux naturels à la condition que ce soit réversible. Qu’à tout moment, il soit possible de revenir en arrière. Si à un moment donné, il est nécessaire d'aménager un parking, nos successeurs et les générations futures estimeront peut-être que ce n’est plus nécessaire.
Objectif : n’utiliser que les ressources locales
L’idée était donc d’imaginer des outils et des méthodes pour aménager des bandes de roulement et des places de parking uniquement avec les matériaux présents sur le site, sans apports extérieurs. Au final, les seuls engins à intervenir sur le chantier ont été les concasseuses, pour travailler la pierre. Le revêtement fabriqué était comme une sorte de macadam à l’eau, sans hydrocarbures.
Les délimitations des places de stationnement ont été réalisées avec des pierres. Et le cheminement piéton jusqu’au point d’info du Parc a été fait sur le même principe, pavé avec les pierres issues du site.
On a poussé le raisonnement encore plus loin : pour les réensemencements, des prélèvements de graines ont été effectués sur place. Les graines ont été mises en culture avec le conservatoire botanique alpin et une entreprise locale, et replantées la saison suivante.
Un projet déclic
Ce projet a été un déclic pour beaucoup d’aménageurs et de bureaux d’étude. Au Parc, ce que nous avait fait en matière de respect de ce site a été étendu aux autres aménagements comme les sentiers, les cabanes, les refuges.... Il n’était plus question de monter des sacs de ciment pour travailler ! On a développé des techniques de construction en pierre sèche avec les matériaux locaux. Par exemple pour la construction du nouveau refuge de Vallonpierre en 2000, nous avons poussé pour que son habillage extérieur soit fait avec des pierres du site.
Même si ça a pris du temps à convaincre les élus locaux et les professionnels de la montagne, au final, tout le monde est aujourd’hui satisfait de cette façon de faire ! »
Côté lecture...
ADEPT, BRABANTS E., Site d'Ailefroide, commune de Pelvoux : projet d'aménagement, PARC NATIONAL DES ECRINS, 1990.
Parc national des Ecrins, communes de Pelvoux : réhabilitation écologique et paysagère du pré de Madame Carle, CAREX ENVIRONNEMENT, 1993.
CAREX ENVIRONNEMENT, Restauration de la couverture végétale sur le Pré de madame Carle : mission d'évaluation, 1995