Bouquetins : des suivis coordonnés dans les Alpes

femelle suitée et marquée © Albert Christophe - PNE

Bilan d’étape à mi-parcours du vaste projet européen de suivi scientifique des populations d'ibex, coordonné par le Parc national des Écrins avec 7 autres gestionnaires d’espaces protégés italiens et français.

Entre le lac Léman et la Méditerranée, le suivi des populations de bouquetins des Alpes a changé d’échelle.

Huit espaces naturels de France et d’Italie sont engagés, depuis plus de 18 mois, dans un travail commun dans le cadre du projet franco-italien LEMED-IBEX, soutenu par des financements européens.

À la fin du 19^ème siècle, le bouquetin, espèce emblématique du patrimoine alpin, avait totalement disparu des massifs français. Il a alors fait l’objet de plusieurs programmes de réintroduction en Vanoise, dans le Queyras et bien sûr dans les Écrins. Depuis, des comptages annuels sont organisés et les différentes populations présentent en France et en Italie sont suivies attentivement.

Tout en restant fragile, la population de bouquetins des Alpes n’est aujourd'hui plus en péril mais « les mesures de gestion de l’espèce et de ses habitats nécessitent des adaptations » précise Ludovic Imberdis, chargé de mission « faune » au Parc national des Écrins.

Ce sont les Parcs nationaux de la Vanoise, du Mercantour et du Grand Paradis, le Conservatoire départemental d'Espaces naturels ASTERS, la Région autonome Vallée d'Aoste, les aires protégées des Alpes Cottiennes et des Alpes Maritimes qui se sont engagées avec le Parc national des Écrins, chargé de coordonner ce programme transfrontalier autour du suivi scientifique du bouquetin et de la diffusion des connaissances.

Pour plus d’infos : « Le bouquetin, du lac Léman à la Méditerranée : tout un programme ! »

Des données, des données et encore des données !

La démarche d’observation repose sur la pose de colliers GPS sur des bouquetins dans les 8 territoires concernés par le projet. Cette technique de suivi, expérimentée dans les Écrins depuis 2013, est désormais déployée à l’échelle des Alpes.

Au cours de l’année 2018, 77 colliers GPS ont ainsi pu être posés autour du cou de bouquetins mâles et femelles et 23 colliers supplémentaires seront posés en 2019. Ces équipements complètent ceux déjà portés par de nombreux bouquetins.

En 2018 dans les Écrins, ils étaient 19 à être "géo localisables". Les colliers fournissent des renseignements sur l’altitude choisie en fonction des saisons, les trajets effectués, les versants privilégiés, les habitudes, selon le sexe des animaux...

> Lire aussi : Bouquetins voyageurs - juillet 2018
Des nouvelles des bouquetins des Écrins - février 2018

Pour connaître la résistance d’une espèce animale aux maladies, il est important de connaître son patrimoine génétique. Les agents des parcs nationaux et des espaces protégés partenaires se sont donc attelés à la lourde tâche de récolte d’échantillons (peau, poils, sang) au cours des captures réalisées durant le printemps et l’été 2018.

Les agents du Parc national des Écrins ont également récupérés des échantillons sur les populations du Queyras, en partenariat avec leurs homologues du Parc naturel Régional.

Au total, près de 450 échantillons, récoltés de part et d’autres de la frontière franco-italienne, ont pu être envoyés au laboratoire de l’université de Zurich en Suisse qui sera prochainement en mesure de nous informer des épidémies survenues ces dernières années, de la généalogie de chaque bouquetin, etc.

Enfin, une centaine d’échantillons sanguins a pu être envoyée aux laboratoires départementaux vétérinaires des Hautes-Alpes et de Savoie, au cours de l’année 2018, pour analyser les maladies auxquelles nos populations de bouquetins font face.

L’année 2019 est placée sous le signe de l’analyse des données récoltées au cours de l’année passée mais également lors des précédentes campagnes de recherches scientifiques sur cette espèce.
« Un prestataire va être sélectionné pour traiter le nombre important d’informations accumulées grâce aux colliers GPS » explique Karine Leclavier qui assure la coordination de ce projet transfrontalier au sein du Parc national des Écrins. Autant d'analyses qui seront ensuite valorisées auprès de différents publics sous forme d’études scientifiques, de cartes, de guides de bonnes pratiques mais aussi de conférences et de projets avec les écoles du territoire.

Des outils de sensibilisation et de partage

En 2013, le Parc national des Écrins a développé une application générique permettant le suivi des bouquetins équipés de colliers GPS. Ce mini-site, permet de visualiser les déplacements des bouquetins depuis chez soi avec son ordinateur ou son smartphone.

> suivez les bouquetins à distance

Dans le cadre du projet LEMED-IBEX et grâce aux financements de l’Europe, l’application a pu être améliorée et déployée dans les Parcs nationaux de la Vanoise, du Mercantour et l’aire protégée des Alpes Maritimes. Le Conservatoire départemental d'Espaces naturels ASTERS et l’aire protégée des Alpes Cottiennes, tous deux partenaires du projet, sont également en cours de déploiement de l’application. A l’heure actuelle, ce sont près de 60 bouquetins dont on peut suivre les déplacements en direct.

En parallèle, les partenaires du projet et l’entreprise italienne Mediacor travaillent à la réalisation d’un documentaire en 5 épisodes sur le bouquetin, son histoire et les recherches scientifiques associées. Les premiers épisodes devraient être disponibles au cours de 1er semestre 2019.

Le film d’animation « Ibex in the mountain », réalisé par l’entreprise Rektangle et disponible depuis décembre 2017, nous renseigne quant à lui sur les origines et les objectifs du projet Alcotra LEMED-IBEX avec humour et pédagogie.

Enfin, c’est à la Maison du parc de Briançon que l’exposition permanente sur le bouquetin, le lagopède et le lièvre variable (projet Alcotra CclimatT) sera installée d’ici la fin de l’année 2019. Les agents du Parc national travaillent actuellement à sa conception et sa réalisation avec l’entreprise Nüud.