Une première journée d’échanges variés
Cette réunion du conseil scientifique a été l’occasion pour les nouveaux membres nommés au printemps dernier de découvrir le très beau site du lac Lauvitel. Un lieu parmi les plus contrastés du parc national, avec une forte fréquentation des randonneurs sur sa rive nord et une présence humaine quasi inexistante sur sa rive sud, porte d’entrée de la première réserve intégrale de France métropolitaine
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Ce lieu s’est révélé idéal pour la première intervention du conseil par Laurent Cavalli, écologue spécialiste des lacs d'altitude. Il y a notamment rappelé l'historique et la position du conseil et du Parc national sur la gestion des milieux halieutiques ainsi que les collaborations anciennes avec les fédérations de pêche pour arriver à trouver les meilleurs équilibres.
Puis, sur une proposition de Philippe Bourdeau, géographe, le conseil a débattu autour de l'éthique dans l'utilisation des technologies d'observation de la biodiversité et de la fréquentation humaine. Appareils photo automatiques, bioacoustique, intelligence artificielle, représentent en effet autant de nouvelles possibilités techniques mobilisables par les scientifiques dans leurs recherches, ce qui peut apparaître en contradiction avec la nature sauvage et les idéaux de quiétude et de retour aux sources que portent les espaces protégés. À ce sujet, le conseil scientifique a rappelé l'importance de la préservation de la vie privée quelle que soit la technologie. En particulier, l'obtention du consentement des personnes « captées » comme c'est déjà le cas lors des enquêtes sociologiques doit être la règle lorsque de tels outils sont mobilisés.
La première journée s'est clôturée sur un débat animé par la philosophe Virginie Maris autour de la notion de sauvage et de réserve intégrale, avec en arrière-plan celle du Lauvitel et l'intervention des scientifiques dans cet espace.
Une deuxième journée consacrée à la réserve intégrale
Pour donner un côté plus concret à leurs échanges, les membres du conseil ont pu visiter la réserve intégrale du Lauvitel le lendemain matin. Jérôme Forêt, technicien du patrimoine en Oisans, a rappelé brièvement les programmes scientifiques en cours dans cet espace, dont le dispositif Forêts sentinelles. Les scientifiques qui mènent actuellement des recherches dans la réserve ont également profité de la visite pour présenter leurs travaux à leurs pairs : Wilfried Thullier et les prospections dans le cadre du dispositif ORCHAMP, Florence Mocci et les premiers résultats des sondages archéologiques menés au printemps par son équipe, et Gilles Yoccoz et le suivi des micro-mammifères, le plus ancien de la réserve.
De retour sur la rive nord du lac, la journée s’est poursuivie par un échange autour de l’avenir de la réserve. Pour enrichir les débats, le président du conseil avait invité plusieurs partenaires d'institutions de recherche, dont John Thomson, président du conseil scientifique du Parc national du Mercantour. Au cours des discussions, le conseil a affiché sa volonté que la réserve intégrale du Lauvitel soit un outil de recherche mobilisable dans le cadre des Zones Ateliers, un dispositif de recherche porté l’institut Écologie et environnement du CNRS, qui participe à la contribution française au dispositif européen de suivi à long terme de l’environnement « e-LTER ». À ce titre, la Zone Atelier Alpes contribue notamment à eLTER via le site d’étude Lautaret-Oisans qui se met en place progressivement et inclut la réserve intégrale de Lauvitel. En effet, ce dispositif permettra d’ouvrir les espaces concernés à la recherche internationale via 3 modalités : l’accès aux données (virtual access), l’intervention des équipes de terrain qui pourront recueillir des données sur le long terme pour d’autres chercheurs qui ne sont pas sur place (remote access) et enfin l’accueil physique d’équipes de chercheurs venant maniper sur le terrain (physical access).
Pendant ces 2 journées intenses, les participants ont pu mieux cerner les enjeux et les contraintes de gestion d'une réserve intégrale de haute montagne. A la clé, une meilleure projection sur les évolutions à envisager pour contribuer au mieux aux priorités de la recherche française et européenne !