Un site favorable et fréquenté
Repérés depuis une quinzaine d’années autour du col, les lagopèdes y ont trouvé toutes les caractéristiques d’un habitat propice : un enchevêtrement de gros rochers, de prairies alpines et d’éboulis répartis sur une large combe en partie protégée naturellement par des falaises. Les yeux des galliformes devinent habilement ici une cachette au sol pour abriter un nid, là un pierrier qui permettra au lagopède de mettre à profit le camouflage naturel que constitue son plumage estival – couleur « roche » !
La zone de quiétude s'étend sur une vingtaine d'hectares
Afin de s’assurer de leur présence cette année encore, Pierre Bouvet, chargé de mission espèces arctico-alpines au Parc national, a réalisé une prospection au mois de mai 2022. A alors été révélée la présence d’au moins deux mâles sur un site d’une vingtaine d’hectares, site en partie limitrophe du sentier du Petit Galibier Ouest. « Nous avions donc tous les paramètres pour proposer à la commune un dispositif au double rôle de protection et de sensibilisation, constate Pierre. D’un côté, un oiseau emblématique qui a trouvé son habitat de prédilection, et de l’autre, un itinéraire régulièrement arpenté à proximité d’un col non moins emblématique ! »
Dispositif léger, enjeux lourds de sens !
Une zone de quiétude est matérialisée par un fil identique à ceux des parcs agricoles, sur lequel une signalétique invite le promeneur à éviter le secteur ainsi délimité et donc à ne pas déranger les lagopèdes pendant la phase critique qu’est la période de la reproduction. « Être léger et rester visible, c’est la vocation du "lago’quiet", qui n’est en place que pendant la période de croissance des jeunes, un moment essentiel pour accumuler suffisamment de forces pour surmonter l’hiver », ajoute Pierre.
La signalétique met en évidence ce que l'œil ne voit pas toujours !
La réalité est en effet sans appel pour le lagopède alpin. Dans les Alpes françaises, l’indice d’abondance – qui estime la population d’une espèce à partir des effectifs observés – a diminué d’au moins 10 % entre 2000 et 2020, et jusqu’à 60 % dans certains massifs… Le travail pour freiner le déclin de la perdrix des neiges ne fait que commencer !
« Aimer, c’est commencer à préserver »
Parallèlement à la mise en place d’une zone de quiétude, des expositions permanentes sur les espèces arctico-alpines seront mises en place dans trois refuges : l’Alpe de Villar d’Arêne (Brianconnais), la Lavey (Oisans) et Vallonpierre (Valgaudemar). Le lièvre variable accompagnera le lagopède alpin auprès des randonneurs des Écrins pour sensibiliser à leur présence et aux menaces qui pèsent sur eux. Des animations dans ces trois refuges auront aussi lieu tout l’été pour faire découvrir l’espèce si discrète qu’est le lagopède, son lieu de vie, ses habitudes, et se sentir un peu à sa place. « Aimer, c’est commencer à préserver », tel est le message en filigrane d’Adryan, le stagiaire du Parc national qui réalise ces interventions.
Un couple de lagopèdes alpins esquisse la forme d'un cœur, comme une invitation à respecter de leur intimité.