La seconde expédition a eu lieu, malgré des conditions climatiques très difficiles, rarement vues de mémoire de guide sur la Barre. Le 27 août dernier, une équipe de géomètres-experts et d'alpinistes est partie à l'assaut de la Barre des Ecrins.
Un résultat qui sera validé par une seconde campagne l'année prochaine, mais qui, d'ores et déjà, constitue une avancée dans la connaissance de nos sommets alpins...
« Cette campagne, réalisée après celle du Mont Blanc en 2013 par des géomètres-experts et à l'initiative de l'OGE (ndlr : Ordre des Géomètres-Experts), est une vraie première » explique Jean-Pierre Richaud, géomètre-expert à Pertuis et président de la Chambre régionale PACA-Corse de l'UNGE à l'initiative de l'opération.
« Nous avons voulu nous adjoindre les renforts du Conseil Régional de l'Ordre des géomètres-experts de Marseille, de la Chambre Régionale des Notaires et des sociétés spécialisées AMP, Coutot-Roehrig, Geomesure, Géotopo, ISTerre, Teria, et Trimble pour les calculs et le matériel. » Car la mesure est complexe et délicate...
En effet, non seulement l'exploit est sportif mais il est aussi technique dans un contexte scientifique crucial pour cette partie de la chaine alpine, dont chercheurs et géologues souhaitent étudier la surrection.
« Les Alpes bougent, elles sont vivantes ! » résume Jean-Pierre Richaud, comme les recherches scientifiques sur cette zone. Il estime qu'il y a un soulèvement dû au rebond isostatique induit par la fonte des glaciers ; la part de la tectonique des plaques et de la compression liée aux mouvements relatifs des plaques européenne et africaine (« promontoire adriatique ») restant secondaire.
Une mesure GPS ultra-précise
Dans tous les cas, l'intérêt des mesures de position et d'altimétrie est multiple comme le note Jean-Pierre Richaud : « Nous allons bénéficier de mesures sur la Barre des Écrins, un massif cristallin externe, c'est-à-dire directement sur le socle rocheux et non pas sur la couverture sédimentaire, mais aussi créer un repère fixe (ndlr : un « T0 » selon le jargon technique) qui permettra de comparer les mesures dans le temps, et d'alimenter la réflexion des chercheurs sur la part relative du rebond isostatique et de la compression alpine. »
Ce jour-là, pour la première fois et à la faveur du 150ème anniversaire de l'ascension initiale de la Barre des Écrins, le plus haut sommet de la région PACA a donc pu être mesuré.
Le principe : les géomètres-experts ont placé ce que l'on nomme un repère, à savoir un support métallique fixe au sommet à mesurer, sur lequel a été fixé un récepteur GPS. Une fois connecté aux réseaux satellitaires en rotation autour de la terre, ce récepteur a permis de recueillir les données de géopositionnement du point établi par le repère : latitude, longitude et altitude. Et ce, au cm près. Ces données « brutes » ont été transmises à l'IGN (Institut Géographique National) pour le calcul de l'altitude définitive après diverses corrections liées à l'atmosphère, aux écarts de position des satellites, etc.
Reportage Ecrins. Mesure à 4000 mètres
Au centimètre près !
Verdict : après avoir également mesuré par une méthode plus traditionnelle dite de nivellement et in situ la différence entre le repère placé très légèrement en dessous du sommet et le point le plus en haut, l'altitude des Écrins est établie précisément à 4102,10 m.
« Une nouvelle campagne de validation est prévue en 2015 » précise Jean-Pierre Richaud, car compte tenu des conditions climatiques c'est précisément le sommet de neige qui été mesuré et non le rocher. « Mais d'ores et déjà nous pouvons affirmer que la Barre, réputée s'élever à 4102 mètres est pour la première fois précisée au centimètre ! Et les repères posés permettront par ailleurs aux scientifiques de suivre sur plusieurs années les variations d'altitude des trois sommets, la fameuse surrection ».
Pour la petite histoire, un notaire en a même profité, en guise de clin d'oeil, pour rédiger l'acte notarié le plus haut de France avec la collaboration des géomètres-experts...
Menée par Jean-Pierre Richaud, géomètre-expert à Pertuis, et président de la Chambre régionale PACA-Corse de l'UNGE, une cordée de géomètres-experts a réalisé la première mesure centimétrique de la Barre des Écrins.
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Barre des Écrins : la mesure d'altitude est reportée
Juillet 2014 - L'expédition de géomètres et notaires chargés de mesurer précisément le toit des Écrins n'a pas pu atteindre le sommet en raison des mauvaises conditions climatiques. Pour l'instant, la Barre des Écrins reste à 4102 m !