Lumière sur les voltigeuses de la nuit !

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Chaque année d’avril à septembre, l’église de Châteauroux-les-Alpes accueille des invités d’un genre un peu spécial : plusieurs centaines de chauves-souris, principalement des grands murins, qui viennent se reproduire dans les combles du bâtiment. Pour en apprendre plus sur cette colonie et la faire connaître au grand public, un projet mené par le Parc national débute cette année.

Les grands murins de l'église de Châteauroux © Mireille Coulon - PNE

Une colonie présente depuis au moins 40 ans

Ces visiteuses estivales ont jeté leur dévolu sur les combles de l’église Saint-Irénée de Châteauroux-les-Alpes depuis au moins 40 ans, date des premiers rapports de comptage rédigés par les toutes premières équipes du Parc national des Écrins. Les effectifs de la colonie sont estimés à 600 individus au total, majoritairement des grands murins, assez rares dans les Hautes-Alpes, auxquels se joignent probablement des petits murins, une espèce encore plus menacée. Toutes les chauves-souris en France font l’objet d’une forte protection nationale, européenne et internationale.

Grand murin © François Schwaab - PNE La reproduction des chauves-souris en bref

À la sortie de l’hiver, les chauves-souris quittent leur gîte d’hivernage. Pendant la période estivale, les mâles vivent en solitaire, pendant que les femelles organisées en colonie rejoignent leur gîte de reproduction pour y mettre bas, puis allaiter leur petit jusqu’à leur émancipation. Les chauves-souris font un petit par an et le taux de survie est de 50 %, ce qui est faible. Les petits naissent sans poil et lorsque leur mère part chasser la nuit, ils ont besoin d’un endroit bien abrité. Pour se réchauffer, ils vivent serrés les uns contre les autres et s’organisent en nurseries. À l’automne, les mâles regagnent le gîte de reproduction pour s’accoupler, puis tous les individus se dispersent pour passer l’hiver dans divers gîtes d’hibernation, qui pour le moment sont inconnus pour la population de Châteauroux.

L’ADN à la rescousse

D’autres questions restent en suspens pour cette colonie : où les chauves-souris se déplacent-elles ? Que mangent-elles ? Quelles sont leurs zones de chasse ? Ont-elles des échanges avec d’autres populations ? Répondre à ces interrogations constitue le premier objectif du projet Voltigeuses de la nuit, entamé par le Parc national cette année et qui durera trois ans. Des analyses génétiques du guano des chauves-souris permettront d’établir l’état sanitaire des individus mais surtout de mieux connaître leur régime alimentaire. À la clé, une estimation des bénéfices écologiques rendus par ces demoiselles volantes, qui participent à la chaîne alimentaire en limitant la propagation éventuelle d’invertébrés comme les moustiques. La génétique permettra également de lever définitivement le voile sur la présence et la proportion de grands et petits murins et d’individus hybrides.

Grands murins © David Aupermann

Un décryptage des comportements et des déplacements

Des études comportementales viendront compléter ce volet scientifique. Grâce à des caméras placées sous les combles de l’église et avec un renfort probable de l’intelligence artificielle, les comportements des chauves-souris pendant la période de reproduction seront scrutés de près. Certains individus seront également équipés d’un émetteur pour étudier leurs routes de vol, identifier les zones de chasse et les gîtes secondaires, et établir les éventuelles connexions avec d’autres colonies, notamment celle voisine de Mont-Dauphin (Eygliers).

Ces différentes études seront confiées à des experts, avec des publications scientifiques prévues à l’issue du projet.

Faire connaître pour mieux protéger

Les grands murins de l'église de Châteauroux © Mireille Coulon - PNE Les visées scientifiques du projet Voltigeuses de la nuit se doublent d’un objectif pédagogique : sensibiliser le grand public aux chauves-souris et se défaire des idées reçues sur ces petites bêtes parfois mal-aimées. Pour cela, le Parc national dispose d’un atout de choix : la maison du Parc de l’Embrunais, distante d’à peine 100 mètres de l’église qui accueille la colonie. Le projet prévoit ainsi une nouvelle exposition dédiée aux chauves-souris à la maison du Parc. Dans celle-ci, les visiteurs pourront suivre la colonie en direct et zoomer sur les chauves-souris grâce à l’une des caméras installées dans les combles.

Un film sur la colonie et les grands murins en général sera également produit grâce au projet, avec une diffusion prévue dans les maisons du Parc et les écoles du massif. Enfin, les écoles seront également associées via des animations pédagogiques sur les chauves-souris.

Les grands murins de l'église de Châteauroux © Mireille Coulon - PNEQue va t-il se passer en 2025 ?

Dès cette année, le projet connaîtra ses premières réalisations : installation des premières caméras dans les combles au printemps, puis études génétiques du guano pendant l’été. Si vous souhaitez contribuer au projet, il est possible de nous aider sur cette deuxième étape. Pour récolter le guano, un grand nombre de draps blancs sont nécessaires. Si vous possédez de vieux draps au fond d’un placard, voilà une occasion de leur donner une nouvelle vie ! Pour déposer vos dons, merci de prendre contact directement avec la maison du Parc de Châteauroux-les-Alpes.

 

   

Le projet Voltigeuses de la nuit bénéficie d’un budget de 413 000 € et reçoit le soutien financier du ministère de la transition écologique (stratégie nationale de la biodiversité 2030) et de la Région Sud-PACA.