Nouveau comptage des oiseaux d'eau à Serre-Ponçon

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Le samedi 14 janvier 2023 a eu lieu autour du lac de Serre-Ponçon le dénombrement annuel des oiseaux d'eau. Ce comptage, organisé par le Parc national des Écrins et coordonné au niveau régional par la LPO (Ligue de protection des oiseaux), s'inscrit dans une opération plus vaste. Son but ? Suivre l'évolution des populations d'oiseaux d'eau d'un point de vue géographique et numérique, et définir l'importance des zones humides qui accueillent des oiseaux en hiver.

150 espèces recensées en France

Les résultats provenant de 143 pays sont collectés par Wetlands International, une organisation basée aux Pays-Bas. 150 000 bénévoles et professionnels collectent ainsi des informations concernant 871 espèces d'oiseaux d'eau sur 25 000 sites.

En France, ce programme qui a connu quelques modifications depuis sa création, a débuté en 1967. À partir de 1993, toutes les espèces d’oiseaux d’eau soit 150 espèces environ (plongeons, grèbes, hérons, laridés, cormorans, limicoles, canards, rales, grues...) sont prises en compte.

Consulter les bilans 2022.

Les bénévoles à l’œuvre sur le site de Serre-Ponçon © J.P. Coulomb - LPO

Les bénévoles à l’œuvre sur le site de Serre-Ponçon (photo JP Coulomb LPO). En France, 500 à 550 sites sont suivis chaque année par plus de 2 000 observateurs.

Une vingtaine de volontaires autour du lac de Serre-Ponçon

La journée du 14 janvier 2023 était ouverte à tous : 24 personnes, ornithologues confirmés ou simples amateurs, ont scruté le plan d'eau et ses berges à la jumelle et à la longue-vue.

La méthode consiste à parcourir une partie des rives du lac de Serre-Ponçon et du plan d'eau d'Embrun en s'arrêtant sur des points d'observation fixés à l'avance. Le périmètre important du lac impose de constituer trois équipes encadrées par des agents du Parc national et ayant chacune la responsabilité d'une partie du lac (queue du lac, baie Saint-Michel, Ubaye).

L'ensemble des oiseaux d'eau observés est noté pour chaque secteur de comptage simultanément par les trois équipes reliées par radio, ce qui permet de réduire le risque de double comptage.

La météo est très favorable au cours du comptage, ensoleillée sans vent et par une température douce. Le lac est à un niveau habituel pour cette époque, soit 10,3 m sous la côte d’exploitation. Le plan d'eau d'Embrun lui est partiellement gelé (30 à 40 % de sa surface).

Les résultats du recensement 2023

Cette année les résultats sont dominés par quelques points :

  • Le nombre total d'oiseaux observés (917) est en baisse par rapport à 2022 et du niveau de 2019. Cette variation est liée à une seule espèce, le goéland leucophée dont les effectifs sur le lac de Serre-Ponçon sont très variables.

Évolution du nombre d’oiseaux d’eau observés sur le lac de Serre-Ponçon de 2014 à 2022

Dans tous les cas, l’augmentation numérique des oiseaux d’eau sur le lac depuis 2014 n’est pas significative.

  • Cette fois encore, 5 espèces (goéland leucophé, mouette rieuse, grèbe huppé, grand cormoran, canard colvert) dominent l'effectif observé.

Goéland leucophée © P. Saulay - PNE Mouette rieuse © D. Combrisson - PNE Grèbe huppé © D. Combrisson - PNE Grand cormoran © P. Saulay - PNE Canard colvert © P. Saulay - CC BY NC ND

  • Le nombre de goélands leucophés observés est en forte diminution, mais les effectifs varient fortement d’une année à l’autre. Ils peuvent également varier au cours de l’hiver en fonction de la disponibilité alimentaire ou des conditions météorologiques Quelques semaines avant le comptage, les effectifs de goélands dépassaient les 2 000 individus sur le lac. Quelques jours auparavant, on en dénombrait plus de 700 sur le seul plan d’eau d’Embrun.
  • 4 nettes rousses (2 mâles et 2 femelles) observés cette année. Quelques rares individus ont déjà fait des haltes sur le plan d’eau d’Embrun en 2009, 2013, 2014, 2017, 2021 et 2021. Avec le plan d’eau de Saint-Julien-en-Champsaur, ce sont les seuls sites où il est possible d’observer des nettes rousses en hiver.

Nette rousse © D. Combrisson - PNE

  • La mouette rieuse est bien représentée cette année et cette espèce semble être toujours en progression sur le lac en hiver (corrélation R2=0,71).

 

Évolution numérique des mouettes rieuses (à gauche) et des grèbes huppés (à droite)

  • Les grèbes huppés avec 111 individus recensés sont dans la fourchette basse sur le lac de Serre-Ponçon, mais présentent des effectifs globalement stables. Déjà dans les années 1970 et 1980, les effectifs variaient entre 150 et 250 individus sur ce plan d’eau qui est le principal site d’hivernage de cette espèce piscivore dans le val de Durance.
  • Le nombre de grands cormorans est remarquablement stable d'une année à l'autre. Un effectif comparable (20 à 30 individus) était déjà observé dans les années 1970 et 1980 : a-t-on atteint la capacité d'accueil hivernale pour cette espèce ?
  • Le nombre de canards colvert est lui plutôt dans la fourchette haute : les effectifs de ce canard de surface sont très variables d'une année à l'autre, peut-être en lien avec le niveau du lac et de la surface de glace, notamment sur le plan d’eau d’Embrun. Cette espèce affectionne la proximité des vasières qui ne sont pas gelées cette année.
  • Sont absentes les sarcelles d’hiver, habituellement présentes sur le plan d’eau d’Embrun. Elles étaient encore présentes quelques jours avant le comptage mais en faible effectif (2 mâles).

Tous ces résultats n'ont de sens qu'à une échelle biogéographique continentale, puisqu'il s'agit pour beaucoup d'entre eux d'oiseaux nordiques qui viennent passer l'hiver sur des zones d'eau libre. Leur nombre est donc très dépendant de la température et des conditions climatiques.

Résultats des comptages des principales espèces d’oiseaux d’eau sur le lac de Serre-Ponçon depuis 2014

Évolution numérique des principales espèces observées lors des comptages Wetlands sur le lac de Serre-Ponçon de 2014 à 2023

En bref

  • D’une façon générale, les effectifs de piscivores stricts en hiver (grèbe huppé et grand cormoran) sont très stables depuis 2014.
  • Les effectifs de mouette rieuse sont en légère augmentation.
  • Les effectifs de goéland leucophée et de canard col vert sont très variables en fonction des conditions écologiques locales au moment du comptage (température, niveau d’eau, surfaces de glace, disponibilité alimentaire…) et conditionnent les variations de l’effectif global.

D’autres espèces ont été contactées lors de ce comptage :

  • Corneille noire
  • Héron cendré (5)
  • Pipit spioncelle (1)
  • Canard colvert hybridé (1)

Tous ces résultats seront pris en compte dans l’analyse à l’échelle mondiale.

Un grand merci encore à tous les bénévoles qui ont participé à cette opération en 2023 !