Un chantier à enjeux
On ne présente plus Dormillouse, seul hameau habité à l’année en cœur de parc, accessible uniquement à pied, et emblème de l’architecture montagnarde des Alpes du Sud. Les sentiers d’accès et les cheminements dans le village sont très parcourus, à la fois par les randonneurs qui viennent découvrir le site, et par les habitants et leurs brouettes à moteur, nécessaires au ravitaillement.
L’enjeu du chantier était donc triple, comme l’explique Stéphane D’Houwt, technicien sentiers au Parc national : « Il s’agissait de sécuriser le passage dans les endroits les plus exposés, de limiter l’érosion des sentiers par les brouettes et de préserver le caractère patrimonial du site avec des techniques traditionnelles. » Pour concilier ces trois éléments, le parti a été pris de paver les portions de sentiers les plus sensibles par un empierrement en calade. Cette technique ancestrale, entièrement manuelle, consiste à assembler des pierres calibrées ayant une belle face, calées les unes à côté des autres et enfoncées dans le sol à la verticale. Les joints sont ensuite comblés par de la terre. Aucun matériau extérieur n’est donc nécessaire, les pierres étant issues des pierriers aux alentours.
Le sentier des Charbonnières empierré et sécurisé
Deux secteurs ont été concernés par ces travaux de pavage, dont le sentier des Charbonnières. Avec des pics de fréquentation à plus de 600 visiteurs par jour l’été, ce sentier est l’un des principaux accès à Dormillouse. Il est également utilisé pour le ravitaillement des habitants et des trois gîtes du village. La plateforme du sentier est donc soumise à rude épreuve avec le passage régulier des marcheurs et des brouettes à moteur.
Pour renforcer le sentier, en particulier dans les virages, un peu plus de 200 mètres de cheminement ont été pavés et sécurisés par des murets en pierre sèche. Des rigoles en bois ont également été créées pour faciliter l’évacuation des eaux de pluie. Ce chantier a été réalisé par l’entreprise Serpe en deux phases : entre octobre et novembre 2022 et en septembre 2023. Les équipes ont bénéficié au préalable d’une formation à la technique du pavage par Jean-Laurent Grégoire, agent du Parc national en charge de l’entretien des sentiers en Vallouise.
Des travaux plus complexes dans le village
Le deuxième chantier a eu lieu dans le village de Dormillouse, sur le sentier reliant les Enflous aux Romans. Initialement prévus en juin-juillet 2023, les travaux ont été reportés à l’automne afin de ne pas gêner l’activité estivale. Alors que l’équipe intervenant sur le sentier des Charbonnières a pu compter sur des pierriers communaux à côté du chantier pour se fournir en matière première, il n’en était pas de même pour le chantier dans le village : le pierrier communal le plus proche est en effet situé aux Prés Baridons, à plus d’un kilomètre du village…
Pour permettre le passage d’un petit tracteur et de brouettes à moteur indispensables à l’acheminement des 200 tonnes de pierres requises, la « via clause » menant aux Prés Baridons a été remise à sa largeur initiale de 1,40 mètre. Ce chantier de deux semaines réalisé en juin 2022 a été confié à l’entreprise Lagier et Roche de Saint-André-d’Embrun. Les pierres ont ensuite été acheminées pendant l’été par Éric Raymond, agriculteur à Dormillouse, appuyé par l’entreprise caturige Foretscop et l’association de réinsertion du CPIE de Haute-Durance pour tenir les délais serrés des travaux.
L’équipe de l’entreprise italienne Alpivert a ensuite pris le relai dans le village pour paver les 665 mètres de sentier identifiés. Les quatre ouvriers ont ainsi travaillé d’arrache-pied pendant sept semaines entre septembre et octobre 2023, en gardant un niveau de qualité remarquable. Pendant toute cette période, ils ont pu profiter de l’accueil chaleureux du gîte de l’École.
Un financement par le plan France Relance
La totalité des travaux aura coûté près de 200 000 €, entièrement financés par le plan France Relance. Comme le résume Stéphane, « ça a été un défi de réaliser ce chantier avec la contrainte des deux ans du plan de relance. Jamais des travaux de cette ampleur n’avaient été faits sur une période aussi courte ! Nous sommes très satisfaits du résultat : c’est une vraie valeur ajoutée pour le caractère patrimonial du village et pour le déplacement des brouettes à moteur des riverains. »
Avec la fin de ce chantier exceptionnel, c’est également une autre page qui se tourne : la fin du programme sentiers du plan France Relance, qui aura permis de rénover et retracer quatre sentiers de randonnée dans le massif et de remplacer six passerelles, pour un montant global de 650 000 €.
Ces chantiers ont fait l’objet de marchés publics gérés par le secrétariat général du Parc national.