
Depuis l'année 2000, la commune de Saint-Apollinaire conduit des travaux réguliers de curage du lac dans le plus grand respect des écrevisses.
Cette année, une végétation de bord de lac, formée de roseaux alias Phragmites, a fini par colmater l'écoulement du canal d’exutoire qui n'était pas entretenu. Une accumulation de branches et de dépôts solides a fini par faire déborder le canal sur les champs voisins et dégrader fortement le milieu des écrevisses.
La commune s'est appuyée sur les préconisations du Parc national des Ecrins et de l'ONEMA pour réaliser les travaux nécessaires à la restauration de l'habitat de cette espèce patrimoniale.
Le canal a été curé pour retrouver son écoulement naturel et des blocs de pierres ont été installés pour créer des caches aux écrevisses.
Transport nocturne d'écrevisses !
La veille des travaux, des agents de l'ONEMA et du PNE sont intervenus pour capturer les écrevisses présentes dans le canal d'exutoire.
Profitant de l'opportunité, cette action a été ouverte au grand public afin de sensibiliser les habitants sur les enjeux de conservation de cette espèce fragile. Une douzaine de personnes, dont le maire de la commune, était mobilisé pour capturer les écrevisses à pieds blancs dans la nuit du 3 octobre.
Dès la tombée de la nuit, à l'aide de lampes, les écrevisses ont été ramassées à vue.
Tous les individus contactés ont été placés délicatement dans des seaux préalablement désinfectés pour éviter tout risque de contamination. Les écrevisses ont ensuite été systématiquement mesurées avant d’être déposées dans le lac en amont. Une grille située au départ du canal d’exutoire bouchait alors le lac et permettait d'éviter leur retour rapide sur la zone de travaux.
Mesure biométrique sur les individus capturés.
281 individus capturés en 2 heures
La recherche des écrevisses a permis de comptabiliser 281 individus, dont 113 mâles (40,2%) et 168 femelles (59,8%). "Des groupes d'individus classés selon les mesures de leur taille ont pu être établis" nous livre Damien Combrison, garde-moniteur au Parc national des Ecrins.
- Les mâles semblent se répartir en deux cohortes sur la partie haute de l'exutoire. 30-40 mm puis plus de 40 mm. Aucun individu mâle de moins de 30 mm n'a été capturé et très peu au-delà de 55 mm.
- Les femelles semblent se répartir en 3 cohortes. 15-40 mm, 40-60 mm et plus de 60 mm. L'amplitude de taille chez les femelles est plus large que chez les mâles collectés, cependant les individus de plus de 55 mm restent rares.
"Un point important à prendre en compte est la difficulté à capturer les individus les plus jeunes, plus discrets et plus rapides, souvent manqués lors de la session de capture. L'effectif d'individus les plus petits est ainsi sous-estimé" relève Damien Combrisson.
Enfin, les captures ont été effectuées à l'opportunité, sans protocole rigoureux, augmentant le risque de manquer certains individus. "Toutes ces limites ne permettent donc pas de connaître dans le détail l'état des populations d'écrevisses" signale Donovan Maillard, chargé de mission invertébrés au Parc national des Ecrins, chargé du traitement statistique des résultats
Les écrevisses se portent bien
Les observations effectuées permettent de constater un sex-ratio en faveur des femelles mais qui reste relativement équilibré. Les variations de taille chez les écrevisses capturées permettent d'assurer la présence d'individus reproducteurs ainsi que des jeunes de l'année. La population poursuit donc son renouvellement. "Les 281 individus ont été collectés en 2 h, ce qui permet de constater une forte abondance de l'espèce dans le canal" souligne notamment Damien Combrisson.
Finalement, les travaux ont été effectués dans un secteur peu fréquenté par l'espèce et aboutiront à la création de nouveaux habitats favorables. L'avenir de la population ne semble donc pas menacé.
L'autochtone écrevisse à pieds blancs
L’écrevisse à pieds blancs est une espèce de cours d'eau et de lacs aux eaux fraîches et pures du Parc national des Écrins. Espèce protégée, elle a vu son habitat diminuer depuis plusieurs années. En cause, de nombreuses menaces telles que la pollution des milieux, la concurrence avec deux autres espèces ''exotiques'' ou encore la ''peste des écrevisses'' provoquée par un champignon.
Des actions de préservation et de protection sont mises en place par les agents de l'ONEMA (Office National de l'Eau et des Milieux Aquatiques) en collaboration avec le Parc national des Écrins pour tenter de préserver l'écrevisse à pieds blancs.
Pour plus de précisions et de détails concernant les écrevisses, consultez notre dossier "On en pince pour les écrevisses"
Retrouvez aussi la chronique nature "L'écrevisse, une petite bête fragile ?" à écouter.