Alpages sentinelles, la dynamique du réseau

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Plus de 120 personnes réunies à l'IUT de Gap autour de l'avenir des alpages alpins. Le colloque accueilli par le Parc national des Écrins témoigne de l'acuité du sujet. L'occasion de diffuser les premiers résultats obtenus et des outils élaborés collectivement à l'échelle des Alpes.

colloque Alpages sentinelles - bilan POIA - gap - 5 avril 2018 - Parc national des Écrins Le réchauffement climatique est une réalité dans les Alpes. Pour les membres du réseau "Alpages sentinelles", ce n'est pas une découverte. Leur projet est, justement, de tenter d'apporter des
réponses aux interrogations posées par les aléas climatiques aux pratiques pastorales.

Le 5 avril, à Gap, un colloque a permis de réaliser un bilan du programme "Alpages sentinelles" élargi aux Alpes. Au cours des trois dernières années, il a bénéficié des financements des régions PACA et AURA, de l’État et de l'Europe (POIA).

Plusieurs intervenants politiques, techniques ou scientifiques ont présenté l’historique du programme, les résultats obtenus et les outils produits devant une assemblée de 120 personnes réunies à l'IUT à Gap : chercheurs, gestionnaires, éleveurs, chambres d agriculture...

L'occasion d'échanger sur les modalités d'adaptation des pratiques en alpage aux changements climatiques. Et l'enjeu n'est pas des moindres !

+ 2 degrés dans les Alpes depuis 1950 et + 1 degré d'ici 30 ans.
Des conséquences fortes: gels après déneigement, déficit en eau des sols, cumuls importants de température au printemps...
Autant de situations que le dialogue entre les acteurs permet de résoudre pour pérenniser l'activité en alpage. 

colloque Alpages sentinelles - bilan POIA - gap - 5 avril 2018 - Parc national des Écrins colloque Alpages sentinelles - bilan POIA - gap - 5 avril 2018 - Parc national des Écrins colloque Alpages sentinelles - bilan POIA - gap - 5 avril 2018 - Parc national des Écrins

colloque Alpages sentinelles - bilan POIA - gap - 5 avril 2018 - Parc national des ÉcrinsUne augmentation des températures de + 2°C (même 2,5°C de mars à août) ces dernières années, une évapotranspiration qui grimpe de 14 %, une remontée de la limite pluie/neige de 100 à 250 m, une augmentation des sécheresses et des canicules …. Les Alpes sont nettement confrontées au réchauffement climatique.

Avec le réchauffement, la fréquence et l'intensité des aléas climatiques et météorologiques augmentent induisant une variabilité inter-annuelle de la météo qui dépasse largement les capacités d'adaptation courante des systèmes agricoles même dans le sud.

Le réseau Alpages sentinelles essaie d'apporter des réponses à ces interrogations. Initié dans les Ecrins suite aux sécheresses de 2003, 2004 , 2005, le programme a démarré en 2007 avec 2 alpages puis 9 en 2009. Il s'est étendu progressivement ces dernières années aux Parcs nationaux de la Vanoise et du Mercantour, au Parcs naturels régionaux du Vercors, de la Chartreuse et du Luberon, au Ventoux et compte 31 alpages et 37 exploitations suivies.

colloque Alpages sentinelles - bilan POIA - gap - 5 avril 2018 - Parc national des Écrins Alpages sentinelles c'est :

- un espace de dialogue entre des éleveurs, des bergers, des chercheurs, des techniciens pastoraux, des agents de parc… et une inter-disciplinarité riche,

- une série de protocoles robustes et autant que possible simples à mettre en œuvre pour récolter différentes données (météorologiques, de composition et quantité de végétation, de pratiques pastorales, de marge de manœuvre et adaptations des exploitations….)

- une animation locale dans chaque territoire avec des rencontres annuelles et des plaquettes annuelles permettant les échanges et les restitutions aux éleveurs et bergers,

- une animation « alpine » avec des réunions de groupes de travail thématiques permettant des travailler sur des outils ou sur des analyses de données,

- la constitution de bases de données « alpines » renfermant les données de tous les protocoles pour tous les territoires concernés,

- des partenaires financiers convaincus et assidus.

Evaluer, prédire les impacts sur la biodiversité et la fonctionnalité pastorale

Pour une station donnée, la variation de production de biomasse est de 25-30 %, peut-on expliquer ces variations par la météo ?

Pour tous les types de végétation, la somme des températures d’avril à la date de mesure a un effet positif sur la production de biomasse. 
Par ailleurs, l'effet du gel est confirmé sur la production de biomasse. Avec une limite pluie-neige qui remonte, les végétations sont plus exposées aux coups de gel.

Calage mesures biomasse végétale - © Leïla Thouret - Parc national des Écrins

Comprendre les dynamiques des végétations pastorales

On ne constate pas de modification de la composition florale, excepté pour les pelouses nivales. Là-haut, on observe un glissement en terme de composition vers des pelouses intermédiaires avec une augmentation générale de l’abondance des graminoïdes et diminution des plantes en rosettes, très marquée pour les pelouses nivales.

L'effet de l’arrêt du pâturage sur la biodiversité dépend du type de végétation : il est favorable sur les pelouses thermiques et défavorable sur les pelouses intermédiaires et les landes.

Un outil : le diagnostic de vulnérabilité climatique en 5 étapes 

1 – Comprendre le système pastoral en place

2 – Analyser l'exposition au risque climatique sur la base d'une typologie des profils climatiques des alpages.

3 - Analyser la sensibilité à la survenue du risque climatique par rapport à l'alimentation en eau et aux végétations pastorales présentes sur la base d'une typologie des végétations pastorales d'alpage et de leurs fonctionnalités.

4- Raisonner la capacité d'adaptation de l'alpage et/ou de l'exploitation avec les éleveurs et bergers

5 – Définir un jeu de solutions pour s'adapter

Pour pouvoir raisonner la capacité d'adaptation aux changements climatiques, il est nécessaire de connaître la place de l'alpage dans l'exploitation et les marges de manœuvre disponibles sur les exploitations. Plusieurs types de logiques ont été identifiées soit avec l'alpage comme tampon, soit sur l'exploitation, soit à l'interface entre les deux par exemple en jouant sur les dates de montée et de descente. Un outil est en cours d'élaboration.

Une innovation institutionnelle à stabiliser

colloque Alpages sentinelles - bilan POIA - gap - 5 avril 2018 - Parc national des Écrins Le programme « Alpages Sentinelles » a l’attrait, la dynamique mais aussi les fragilités d’une innovation institutionnelle. L’innovation institutionnelle en sociologie est une construction lente et progressive d’un réseau d’acteurs et d’actants en alliance autour d’enjeux dans un contexte qui, s’il doit être « stabilisé », ne l’est jamais définitivement. Des conditions nécessaires, des étapes successives de construction et des points de vigilance permanents pour entretenir la coopération dans le réseau.

L'enjeu pour "Alpages sentinelles" est donc d'entretenir la dynamique de réseau avec une bonne cohérence du programme et de son animation et une confiance entre les acteurs (légitimité, transparence, interdisciplinarité, effort de vulgarisation,...).

"Le projet Alpages sentinelles est financé avec le concours de l'Union européenne : l'Europe s'engage sur le Massif Alpin avec le Fonds Européen de Développement Régional. Il bénéficie aussi du concours du Fonds National d'Aménagement et de Développement du Territoire au titre de la Convention Interrégionale du Massif des Alpes."

Pour en savoir plus

Alpages sentinelles alpins - programme co-financé

Les alpages à la loupe

Changement climatique : quel avenir pour les alpages ?

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